Trois raisons qui rendent tout deuil unique.

Du point de vue de l’enseignement du Bouddha, la souffrance du deuil est le fruit de notre fonctionnement. En effet, nous nous attachons à des êtres, des relations, des objets, des situations sans considérer leur impermanence.

Nous savons bien que nous pouvons être séparés de ceux que nous aimons, nous savons bien qu’un jour nous mourrons, que nous pouvons perdre notre travail, égarer ou casser des objets auxquels nous tenons, etc.

Nous avons besoin d’être entouré de ceux que nous aimons, dans un cadre de vie qui nous convienne, dans un lieu où nous nous sentons en sécurité. Tout cela nous est nécessaire et il n’y a pas de problème à cela, si ce n’est que nous ne prenons pas en compte l’impermanence qui est notre caractéristique même, qui est inhérente à tous les phénomènes composés. C’est une réflexion à laquelle nous sommes invités afin d’être moins fragilisé par la perte.

Le processus de deuil 

Le processus du deuil se vit par étapes, nous passons de l’incrédulité à la colère, de la culpabilité à la tristesse, de phases dépressives en phases d’acceptation, tout cela dans un vécu émotionnel déstabilisant. Ces phases s’interpénètrent, se vivent souvent de façon chaotique et non linéaire.

Si le processus du deuil est universel, son vécu est à chaque fois singulier, parce qu’il est conditionné par une constellation de paramètres qui vont lui donner son caractère unique et singulier.

Pour faciliter la compréhension, j’aborderai ces différentes conditions en prenant l’exemple d’un deuil suite au décès d’un proche. Cependant, les différents deuils en lien avec une rupture amoureuse ou amicale, la perte d’un emploi, la fin d’un projet, etc., sont de la même façon conditionnés par les circonstances.

Explorons ces paramètres. Ils sont de trois types, les circonstances de la mort, les conditions liées à  la personne décédée et la personne endeuillée.

Les circonstances de la mort

Si la mort était plus ou moins attendue, à cause d’une pathologie évolutive ou du grand âge, les proches auront eu le temps de se préparer à la séparation. Tandis que si la mort survient brusquement, accident de la circulation, arrêt cardiaque, ou hémorragie cérébrale, la séparation brutale devient plus complexe à vivre. Sans parler bien sûr des suicides où le sentiment de  culpabilité est bien souvent omniprésent chez les proches.

D’autres circonstances peuvent également colorer le vécu du deuil, s’il y a eu réanimation ou non, si les douleurs physiques n’ont pu être complètement apaisées, si des troubles respiratoires importants ont précédé la mort, etc. Les souffrances peuvent être multiples et laisser les proches dans un sentiment d’impuissance important.

La qualité de l’accompagnement, du moins le sentiment que tout a été fait au mieux, conditionne également la souffrance de la perte, de même que le respect des choix du patient. Pour certains, la présence ou non au moment de la mort aura un impact fort, tant positif que négatif.

Les différents paramètres en lien avec la personne décédée

L’âge du défunt, la nature du lien que ce soit un conjoint, un parent, un enfant, un proche ou un ami, seront déterminants, mais également la nature des échanges en fin de vie, la qualité de la relation qu’elle ait été harmonieuse, conflictuelle ou ambivalente. Il est à noter que des conflits non réglés, générateurs de remords ou de culpabilité, auront un poids important au cours du deuil.

Par ailleurs, le vécu de la maladie ou du grand âge donnent une teinte singulière au deuil. S’il y a eu acceptation ou refus, si les proches ont le sentiment que la personne ne s’est pas suffisamment « battue » ou qu’elle a refusé certains soins, s’il y a eu des opinions différentes dans la famille sur les choix thérapeutiques, tous ces aspects marquent le deuil de façon évidente.

Les conditions appartenant à l’endeuillé

Les expériences passées de deuils plus ou moins difficiles ou un deuil en cours limitent bien souvent les capacités psychiques pour affronter à une souffrance nouvelle. Le sentiment de ne pouvoir faire face peut envahir la personne en deuil et limiter sa capacité à s’adapter à la perte, du moins dans un premier temps. De même, un état de santé fragile ou une personnalité en fragilité psychologique rendra le temps du deuil plus complexe.

D’autres éléments sont également déterminants, ce sont les pertes associées au décès de la personne proche, comme la nécessité de faire face au quotidien, la perte ou le maintien du foyer familial, du niveau social, des moyens financiers.

Nous pouvons voir ainsi qu’en énumérant quelques uns des paramètres qui conditionnent un deuil, que chaque vécu ne peut être que singulier, que chaque membre d’une même famille affectée par le décès d’un proche aura un parcours différent. Ces différences sont parfois source d’incompréhension, on peut avoir l’impression qu’untel semble ne pas souffrir, qu’un autre semble en faire trop, etc. Cela peut être en plus source de conflit qui peut être éviter en comprenant la situation unique de chacun.

Anila Trinlé

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